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À Dunkerque, le Carnaval possède une riche histoire qui remonte à de nombreux siècles. Son origine est liée aux célébrations festives et religieuses des jours gras précédant le Carême. Une ordonnance du Magistrat datant du 16 janvier 1676 réglemente déjà la sortie des masques lors de ces festivités. Ce qui rend le Carnaval dunkerquois unique, c’est qu’au XVIIe et XVIIIe siècle, les armateurs offraient une “foy” aux pêcheurs partant pour l’Islande. Cette “foy” constituait une avance sur salaire ainsi qu’un festin, en partie financé par l’armateur. Cet événement, célébré avant le départ en mer pour six mois, est à l’origine de la Visshersbende (bande des pêcheurs en flamand), bien que distincte du Carnaval des jours gras. 

  

À l’époque, le flamand était la langue dominante à Dunkerque, et les chansons des marins étaient toutes en flamand. Lorsque le départ pour l’Islande et la “foy” coïncident avec les jours gras marquant le début du Carême, les marins se masquent et se déguisent pour participer à leurs festivités préférées. C’est ainsi que la Visshersbende prend un sens carnavalesque. Pendant la Révolution, toute manifestation carnavalesque est interdite par crainte de troubles. 

  

Au XIXe siècle, l’évolution du Carnaval est étroitement liée à l’essor et aux difficultés de la pêche à la morue. Les naufrages dramatiques des morutiers suscitent la générosité, donnant naissance aux sociétés philanthropiques et carnavalesques. La bande des pêcheurs défile le lundi gras, marquant la fin du Carnaval le mercredi des cendres, au début du Carême. 

  

En 1847, un hiver rigoureux oblige les Dunkerquois à reporter les festivités carnavalesques au premier dimanche de Carême, une première dans l’histoire du Carnaval. La seconde moitié du XIXe siècle voit l’apogée de la pêche à la morue, assurant la vitalité du Carnaval. En 1861, le cortège défile pendant cinq heures à travers la ville. 

  

Cependant, avec le déclin de la pêche à la morue, la Visshersbande perd de sa vigueur. En 1896, le journal Le Nord Maritime prédit la fin de la bande des pêcheurs, et en 1900, bien que les bals conservent leur succès, les bandes déclinent, impactant le commerce local. En 1906, la municipalité, sous l’impulsion du maire Alfred Dumont, surnommé “Fret’ch”, initie une dynamique pour relancer le Carnaval de rue. En 1914, avant la Première Guerre mondiale, la bande défile à travers la cité corsaire. Supprimé en 1915 en raison de la guerre, le Carnaval est rétabli en 1920, devenant également un indicateur de la santé économique de la ville. 

  

Les mouvements de grève lors du Carnaval influent sur la participation de la population, comme en février 1924 lors des grèves des ouvriers du textile. Les bals connaissent un grand succès au début du XXe siècle, s’étendant sur une période allant du 29 janvier au 6 mars environ. En 1924, les cuivres rejoignent la musique avec fifres et tambours. La première bande de la Citadelle a lieu en 1926, dans le quartier marin propice à recevoir la bande des pêcheurs. La crise économique des années trente limite les festivités carnavalesques, mais certains Dunkerquois n’hésitent pas à mettre leurs objets de valeur au Mont de Piété pour financer leurs dépenses carnavalesques. 

  

À partir de 1932, la bande des pêcheurs défile le mardi gras à Dunkerque, Rosendaël et Saint-Pol-sur-Mer. Après une période d’abstinence de sept ans due à la Seconde Guerre mondiale, le Carnaval reprend en 1946, entraînant la Visshersbande dans les ruines de Dunkerque. Dans les années cinquante, le Carnaval connaît des difficultés à se développer, les bals remportant plus d’adhésion que les bandes. À la fin du XXe siècle, le Carnaval conserve une influence importante, assurant sa pérennité.